La beauté du geste

Artiste en résidence à l’université de Montpellier, Leonardo Montecchia traque nos gestes quotidiens. Rencontre avec un observateur singulier du corps en mouvement.

J’ai du mal avec le mot chorégraphe, prévient-il. Je me vois plutôt comme un penseur du corps, un corps en relation avec son environnement.

Crédit : Jérôme Guiraud

Cette difficulté à se laisser enfermer, fut-ce dans une définition, c’est sans doute ce qui a fait de Leonardo Montecchia l’éternel voyageur qui a vécu sur 3 continents avant l’âge de 30 ans, battu le pavé de Londres, de Buenos-Aires, de New York, de Paris. Et plus qu’un danseur ou qu’un chorégraphe, un créateur dédié au mouvement…

En quête du geste inutile

Un jour de 2001, Leonardo a « échoué à Montpellier ». Il y est encore, un peu étonné parfois de n’être toujours pas reparti. Artiste en résidence à l’Université de Montpellier jusqu’en avril, il vient faire ce qu’il aime : explorer des chemins nouveaux, dans cette « cité au cœur de la cité » avec ses 45 000 étudiants et ses 4 500 personnels.
Pendant plusieurs mois, Leonardo et ses interprètes vont vivre parmi ces habitants de la planète université : les côtoyer, les observer. Les étudier. “Questionner les gestes du quotidien, précise-t-il : ceux des étudiants, des enseignants, des chercheurs, des personnels. Gestes de transmission, de métier, mais aussi de réflexion, d’impatience…”
Ce qu’il vient traquer plus précisément dans les amphis, les labos, les salles de cours, les bibliothèques, c’est le geste inutile. Une inutilité qu’il place d’emblée dans le champ de la vie. De l’inestimable.

Quelle place, dans notre société hyper productive d’aujourd’hui, pour le geste qui “ne sert à rien” ? Quel espace, dans le champ de l’apprentissage, pour l’inutile ? Est-ce celui de l’inaction ? De la réflexion ?

Un autre regard sur son quotidien

Sur le terrain universitaire, Leonardo se trouve chez lui. Il y transporte sa recherche constante d’un art contemporain qui s’inspire du quotidien, et qui s’adresse à tous. Sa quête d’un « autre corps possible : un corps à imaginer. L’art aide à poser un autre regard sur le réel. A construire un monde différent ».
Un projet particulièrement à sa place au sein d’une université : « c’est ici que l’on fabrique le futur ! L’université est profondément un lieu artistique : lieu d’apprentissage et de recherche, mais aussi de questionnement, de réveil des consciences. C’est un espace de création, fortement lié à l’imaginaire ».
L’accueil en résidence débouchera en avril sur un spectacle ouvert à tous. Une œuvre chorégraphique mettant en scène 5 interprètes et découpée en plusieurs pièces déambulatoires, où étudiants, personnels et visiteurs de l’université seront entraînés de lieu en lieu, sur plusieurs sites de l’UM. « La résidence d’artiste invite chacun à poser un autre regard sur son quotidien. Elle doit aussi permettre au public de pénétrer au cœur de l’université, de la découvrir comme ce qu’elle est : un espace ouvert au monde et sur la société » précise Marta Cases Bobadilla, du service art & culture.