Un nouvel éclairage sur l’origine de la biodiversité amazonienne

A partir d’un gisement daté de 13 millions d’années retrouvé en amazonie péruvienne qui comprend 7 especes de crocodiles fossiles, une équipe de l’ISEM (Université de Montpellier, IRD, CNRS) en partenariat avec Géosciences-Environnement Toulouse, Université Paul Sabatier /CNRS/IRD) et le Muséum d’Histoire Naturelle de Lima (Pérou) éclaire l’origine de l’exubérante biodiversité amazonienne.
Ces résultats viennent d’être publiés dans le journal Proceedings of the royal society b.

Une découverte inespérée

Gnatusuchus pebasensis – Crédit : Kevin Montalbán-Rivera

Depuis 2002, cette équipe internationale prospecte le nord-est du Pérou et exploite des niveaux fossilifères, datés de l’époque Miocène.
« Seuls les fossiles permettent de mieux connaître les modalités d’émergence de l’écosystème amazonien et d’en caractériser le fonctionnement passé. Et ces fossiles, en particulier de vertébrés, sont bien rares ! Autant dire que dans de telles conditions de terrain, exécrables, découvrir un tel gisement est un véritable tour de force » explique Pierre-Olivier Antoine, professeur de paléontologie à l’Université de Montpellier et co-auteur de l’article.
« Chaque fois qu’une telle fenêtre sur le passé s’ouvre, elle fournit des données totalement inédites sur ces écosystèmes du passé. Et ce que l’on y trouve n’est que rarement ce que l’on s’attendait à y découvrir » précise John Flynn, co-auteur de l’article et conservateur des mammifères fossiles à l’American Museum of Natural History à New York

Une hyperdiversité liée à des régimes alimentaires inattendus

La surabondance d’espèces de crocodile découvertes dans le gisement est probablement due à l’utilisation d’une ressource alimentaire inhabituelle pour les crocodiles actuels : les coquillages (comme les palourdes, les moules et les bulots). En effet, parmi les sept espèces de crocodiles décrites dans l’article, trois d’entre elles, totalement nouvelles pour la science, mangeaient sans doute des coquillages. La plus étrange est Gnatusuchus pebasensis, un petit caïman à bec-de-canard doté de dents globuleuses, qui utilisait probablement sa gueule ouverte pour remuer le fond boueux des points d’eau et y croquer palourdes et autres coquillages…
« Quand on a analysé le crâne et les mâchoires de Gnatusuchus et déduit qu’il croquait des coquillages en s’aidant de mouvements latéraux de tête à la façon des ornithorynques, on a tout de suite réalisé qu’il s’agissait d’un animal exceptionnel » se souvient le premier auteur de l’article, Rodolfo Salas-Gismondi, directeur du département de paléontologie du Muséum d’Histoire Naturelle de Lima et doctorant à l’Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier (Université de Montpellier / IRD / CNRS).
Associé aux caïmans mangeurs de coquillages, les chercheurs ont également découvert le premier représentant fossile du caïman amazonien actuel à la gueule plus longue et étroite adaptée à des proies plus classiques.

Partenaires de l’etude :

  • Patrice Baby de l’Institut de Recherche pour le Développement (Géosciences-Environnement Toulouse, Université Paul Sabatier /CNRS/IRD)
  • Julia Tejada-Lara du Muséum d’Histoire Naturelle de Lima (Pérou) et de l’Université de Floride à Gainesville
  • Frank Wesselingh du Naturalis Biodiversity Center de Leiden (Pays-Bas)

Cette étude a notamment été financée par la NASA, le Field Museum (Chicago), l’American Museum of Natural History (Frick Fund, New York), le Programme ECLIPSE II, le Centre National de la Recherche Scientifique et l’Institut de Recherche pour le Développement.

Coordonnées des chercheurs :