Cécile Echalier : objectif biomatériaux

Fabriquer des nouveaux biomatériaux qui auront des applications très attendues en santé et en médecine régénératrice, c’est l’objectif de recherche de Cécile Echalier. La chimiste de l’Institut des biomolécules Max Mousseron vient d’être nommée maîtresse de conférences à l’Université de Montpellier, là-même où elle a usé les bancs des amphis en tant qu’étudiante.

Au départ, ce n’est pas pour faire de la recherche que Cécile Echalier s’est inscrite en licence de chimie à l’Université de Montpellier. « J’étais passionnée par l’enseignement, je voulais intégrer l’IUFM après ma licence pour devenir prof des écoles », se souvient la jeune chercheuse. Une voie toute tracée que le hasard va venir chambouler. Arrivée en master 1, les étudiants chimistes doivent en effet effectuer un stage qui leur est attribué… par tirage au sort. Pour Cécile Echalier, ce sera la chimie des peptides avec Gilles Subra, professeur à l’Université de Montpellier et chercheur à l’Institut des biomolécules Max Mousseron. Une rencontre qui va la détourner du métier de professeur des écoles, « cette expérience a été pour moi l’occasion de découvrir ce qu’était la recherche, mais j’étais toujours attirée par l’enseignement, alors j’ai voulu faire les deux ».

Une nouvelle vocation à laquelle Gilles Subra tend une oreille attentive, proposant à la jeune étudiante de se joindre à son équipe si elle décidait de faire une thèse. L’idée mûrit dans la tête de l’étudiante pendant son master 2 qu’elle passe en partie à l’Université de Glasgow où elle fait un stage de 6 mois dans le domaine de la chémobiologie.

Nouveaux matériaux hybrides

A son retour en 2013, elle intègre effectivement l’équipe Acides aminés, hétérocycles, peptides et protéines de l’Institut des biomolécules Max Mousseron pour une thèse. « J’ai choisi un projet qui démarrait à zéro, j’avais envie d’avoir à faire la preuve de concept ». Ce projet part d’une thématique alors assez nouvelle : les biomatériaux hybrides. En collaboration avec Ahmad Mehdi de l’Institut Charles Gerhardt de Montpellier, la jeune chercheuse combine les expertises en chimie des peptides et en chimie inorganique de ces deux laboratoires pour créer de nouveaux hydrogels hybrides.

« L’idée c’était d’appliquer la chimie sol-gel à la synthèse de matériaux utilisés dans le domaine de la santé, c’était assez précurseur à l’époque », se souvient la chimiste. Car le développement de ces biomatériaux nécessite de recourir à une chimie douce, « les processus impliqués doivent être compatibles avec les cellules vivantes, on ne peut notamment pas employer de solvants toxiques par exemple ».

Un défi que Cécile Echalier prend à bras le corps pendant ses 3 années de thèse au cours desquelles elle signe 5 articles comme premier auteur, et une thématique qui prend de l’ampleur. « A la fin de ma thèse j’ai formé à la chimie de ces matériaux hybrides, 3 doctorants qui ont poursuivi les recherches que j’avais initiées », explique-t-elle. En 2016, elle se voit décerner une bourse l’Oréal-UNESCO, une dotation que la chimiste va utiliser pour acquérir une imprimante 3D et aller ainsi plus loin dans la création de matériaux.

Finalité utile

Après cette thèse remarquable, Cécile Echalier part en post-doctorat à Heidelberg en Allemagne où elle délaisse provisoirement la thématique des biomatériaux pour travailler en chémobiologie. Un changement de sujet mais un fil conducteur que la jeune femme ne lâche pas : « j’ai besoin de savoir que ma recherche va avoir une finalité utile, ce n’est pas juste moi qui m’amuse dans mon labo, il faut que cela serve à quelque chose ». Dans ce laboratoire européen de biologie moléculaire, la chercheuse va alors développer des sondes pour étudier le mécanisme d’activation de candidats médicaments.

Un post-doctorat « utile » qui sera suivi d’un deuxième, cette fois à l’Imperial College London où Cécile Echalier retrouve ses chers biomatériaux pendant 2 ans et demi, pour ne plus les lâcher ensuite. A son retour en France en 2021, elle reprend en effet la direction de l’Université de Montpellier où elle obtient un poste d’attachée temporaire d’enseignement et de recherche (ATER). Pour la dimension enseignement, la nouvelle ATER donne des cours à la Faculté de pharmacie, mais aussi à l’IUT de Sète et à la Faculté des sciences. L’enseignante apprécie de s’adresser « à un public très varié, qui se destine aussi bien à la recherche qu’à des carrières d’ingénieurs ou de techniciens ».

Pour la dimension recherche, c’est toujours à l’IBMM que la jeune femme pose ses valises. Elle y retrouve Gilles Subra et la thématique des biomatériaux qui prend un nouvel essor en 2022 avec le lancement de Nanoremedi, un programme de recherche et de formation mené conjointement par six universités européennes qui vise à former des doctorants dans le domaine des peptides et des nanomatériaux et qui a reçu un financement Marie Skłodowska-Curie Actions Doctoral Network.

Applications médicales

En collaboration avec l’équipe de Danièle Noël à l’IRMB et les autres partenaires du consortium européen, les chimistes visent avec Nanoremedi à développer de nouveaux matériaux pour la médecine régénérative. L’équipe de chercheurs se concentre plus particulièrement sur trois applications médicales : « l’ingénierie de greffons vasculaires afin de remplacer les artères endommagées, le développement de biothérapies à base de cellules souches pour la réparation des os et du cartilage et la mise au point de stratégies pour favoriser l’intégration d’implants et prévenir leur contamination bactérienne », détaille Cécile Echalier.

Un peu plus d’un an après le lancement du projet, 13 doctorants ont été recrutés pour mener à bien ces objectifs ambitieux. Et Cécile Echalier elle vient de monter une nouvelle marche dans sa carrière « au 1er novembre j’ai été nommée maîtresse de conférences à l’Université de Montpellier, c’est un moment important car cela me permet désormais de prétendre à des financements en tant que porteur de projet ». La chimiste a d’ores et déjà déposé un projet ANR Jeune chercheuse – jeune chercheur visant à développer encore des nouvelles chimies plus douces, compatibles cette fois avec des techniques d’impression 3D. La réponse est attendue pour fin 2024, avec impatience.