Le sanglier de la discorde

Mieux connaître le sanglier pour mieux cohabiter avec lui, c’est un des objectifs de Raphaël Mathevet et Simon Chamaillé, chercheurs au Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive qui ont coordonné un projet sur la gestion intégrée du sanglier.

photos © Creaturart, Francois Roux, Hedi-Kun – stock.adobe.com

Avec 17 millions d’hectares boisés, la forêt française retrouve sa superficie précédent les défrichements médiévaux. Un espace vital en pleine expansion arpenté par plus de 1,5 millions de sangliers qui en repoussent les frontières. Un voisinage parfois source de tensions : « l’augmentation des densités de sangliers est associée à une recrudescence des dégâts agricoles, à des collisions routières croissantes et souvent à des conflits entre chasseurs, agriculteurs, gestionnaires d’espaces protégés, et autres usagers des territoires ruraux et périurbains », explique Raphaël Mathevet, chercheur au Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive1.

Comment permettre à tous ces acteurs de s’accorder pour trouver une juste place au sanglier ? Pour fluidifier cette cohabitation, Simon Chamaillé et Raphaël Mathevet ont coordonné un projet consacré à la gestion intégrée de cet animal. « Mieux comprendre la biologie, les mœurs et les habitudes des animaux mais aussi les interdépendances fonctionnelles, économiques, sociales et écologiques des territoires concernés est indispensable pour créer une dynamique collaborative », explique Raphaël Mathevet.

Les chercheurs ont posé leurs valises emplies de colliers GPS et de pièges photographiques dans les gorges du Gardon et le parc national des Écrins pour étudier les déplacements des sangliers. Leur objectif : obtenir des données factuelles sur la façon dont l’animal utilise l’espace, et vérifier ainsi si les zones protégées où la chasse est interdite leur servent de refuge. Mais aussi aller à la rencontre des habitants pour partager avec eux ces données et leur permettre de mieux connaître le sanglier.

« L’enjeu de communication est colossal, c’est aussi un vrai projet de médiation scientifique et sociale », confient les chercheurs qui ont développé pour l’occasion un jeu sérieux proposant par exemple aux chasseurs d’être une population de sangliers. « Cela leur permet d’adopter le point de vue de l’animal pour réfléchir aux effets de leurs pratiques », souligne Raphaël Mathevet. Des méthodes que les scientifiques transposent aujourd’hui en milieu urbain dans le cadre cadre d’un projet avec les métropoles de Montpellier et de Nîmes. Objectif : mieux cerner les déplacements du sanglier en ville mais aussi mieux comprendre les relations que les citadins entretiennent avec ces animaux, avec qui nous partageons de plus en plus les friches urbaines, parcs et jardins.

Regarder la conférence de Raphaël Mathevet à l’Agora des savoirs « Sangliers, géographies d’un animal politique »


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  1. Cefe (CNRS, UM, IRD, EPHE)
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