Les lauriers de Mathilde Guérin(ix)

C’est avec une histoire de druides, de Romains et de Gaulois que Mathilde Guérin, doctorante de l’École nationale supérieure de chimie, a remporté les lauriers, non pas de César mais de la victoire, au concours régional Ma thèse en 180 secondes. Le 10 juin elle participera à la grande finale nationale organisée à Lutèce avec derrière elle, tout le village des irréductibles montpelliérains.

Nous sommes en 2021 après Jésus-Christ. Toute la Gaule est occupée par le coronavirus. Toute ? Non ! Une équipe composée d’irréductibles thésards résiste encore et toujours à l’envahisseur et participe, en distanciel, à la finale régionale du grand concours de vulgarisation scientifique « Ma thèse en 180 secondes ». Alors que les 19 candidat.e.s se succèdent dans ce Combat des chefs à huis-clos, une jeune femme vêtue de blanc et rouge fait son entrée : « Oh mais quelle plaie ! Pronostix avait peut-être raison le jour où il m’a dit : « Écoute jeune druide, travailler sur les plaies étendues, profondes ou chroniques ça va être compliqué ! Tu perds ton temps, tu veux juste épater la galerie au concours mon remède en 180 secondes ! »

Ce que Pronostix n’avait visiblement pas prédit c’est que Mathilde Guérin(-ix), inscrite à l’école doctorale Sciences chimiques Balard, charmerait le jury avec sa prestation tout droit sortie d’un album d’Astérix, « sauf que mes Romains à moi sont des bactéries qui essayent d’envahir le village de Plaie-ouverte-qui-fait-malix ». Le ton est donné ! Inscrite en doctorat à l’École nationale supérieure de chimie de Montpellier, l’apprentie druidesse poursuit depuis presque deux ans son Idéfix : lutter contre la résistance bactérienne en concevant un pansement intelligent composé de particules hybrides capable d’aider à la cicatrisation des plaies et d’éviter les surinfections. Une véritable alternative aux antibiotiques « parce que les antibiotix c’est pas automatix, parlez-en à votre druide » s’amuse Mathilde lors de sa prestation.

Le tour de Gaule de Mathilde

C’est en 2019 que la jeune Normande, cousine éloignée d’Olaf Grossebaf, pose sa hutte à Montpellier, après avoir décroché son diplôme d’ingénieure à Strasbourg. Son Domaine des dieux ? La chimie « depuis l’adolescence » et la biologie « parce que le corps humain et tout ce qui s’y passe me fascine. » Très vite, Mathilde Guérin sait ce qu’elle cherche : « Un sujet de thèse qui me permette de combiner mes deux passions et qui puisse s’appliquer à la santé. » C’est l’Institut des biomolécules Max Mousseron à Montpellier et le Cirimat à Toulouse qui lui offriront cette opportunité dans le cadre d’une thèse financée par l’Institut Carnot chimie Balard Cirimat.

Sa participation à Ma thèse en 180 secondes, Mathilde l’avait planifiée il y a longtemps déjà, quand, étudiante en classe préparatoire physique-chimie au Havre, elle projetait déjà sa thèse. « C’est vrai que ce concours j’y pense depuis longtemps. J’aime me lancer des défis, j’aime vulgariser, je le fais tout le temps avec ma famille, avec mes ami.e.s parce que j’ai envie de partager ce que je fais. C’est aussi l’occasion de montrer au grand public et aux jeunes étudiant.e.s le monde de la recherche… et pourquoi pas de susciter de la curiosité et qui sait une vocation. » Avant cette première expérience Mathilde s’était d’ailleurs essayée avec succès au concours « Ma thèse en 400 mots » organisé par l’Université de Perpignan où elle a également remporté le prix du jury.

Le secret de la potion magique

En attendant la grande finale nationale du 10 juin à laquelle Mathilde Guerin s’est qualifiée, elle peaufine son texte, travaille sa diction, applique les conseils reçus lors des trois jours de formation dispensés par le collège doctoral en mars dernier : « Nous avons appris à mieux maîtriser l’oral, l’importance des silences, les slides, la cohérence du texte, j’ai changé de scénario au moins quinze fois… On rencontre les doctorant.e.s des autres disciplines et on réalise que la vulgarisation n’est pas la même selon que l’on fait de la physique quantique ou des sciences humaines. Et au-delà du concours c’est une très bonne expérience pour nos futures carrières. »

Une carrière que la jeune chimiste envisage bien sûr dans la recherche, privée ou publique peu importe, « du moment que l’approche est pluridisciplinaire et qu’elle s’applique au milieu médical ». Et lorsqu’au moment de se quitter, nous lui demandons le secret d’un tel enthousiasme et d’une telle énergie, c’est avec Bonemine qu’elle répond : « Ma potion magique vous voulez-dire ? La danse classique et le violon que je pratique au conservatoire depuis que j’ai quatre ans. » De quoi faire de l’ombre au barde Assurancetourix lors du prochain banquet de la victoire prévu le 10 juin !

Ma thèse en 180 secondes (MT180)

Organisé chaque année par le CNRS en partenariat avec les présidents d’Universités, « Ma thèse en 180 secondes » propose aux doctorants de présenter leur sujet de recherche, en français et en termes simples, à un auditoire profane et diversifié. Chaque doctorant ou doctorante doit faire, en trois minutes, un exposé clair, concis et néanmoins convaincant sur son projet de recherche. Ceci avec l’appui d’une seule diapositive ! Ce concours s’inspire de Three minute thesis (3MT®), conçu à l’Université du Queensland en Australie. Un concept repris en 2012 au Québec par l’Association francophone pour le savoir, l’Acfas qui a souhaité l’étendre à 20 pays francophones.